De la bande dessinée à la science-fiction : aventures littéraires d’un adolescent des années 1930.
Nous sommes sur les bords de la rivière des Outaouais, au milieu des années 1930. Ernest Bilodeau, bibliothécaire-adjoint au Parlement d’Ottawa, collabore depuis plusieurs années à divers journaux et publie ses carnets de voyage. Son épouse, Juliette Madore, est la nièce de l’écrivain Louis Fréchette; il va donc sans dire que la littérature occupe une place très importante chez les Bilodeau.
Entre 1933 et 1940, la famille crée un petit journal littéraire dans lequel parents et enfants rédigent des poèmes, des contes et même de petites chansons. Par ce journal, les enfants Bilodeau explorent diverses formes littéraires.

Deux de ces textes retiennent notre attention. Le premier, par son format. Il s’agit de petites bandes dessinées, forme de littérature plutôt rare dans le Québec des années 1930. La bande dessinée de la province est alors dominée par les comic strips américains qui paraissent dans la majorité des quotidiens de l’époque. En ce qui concerne les auteurs québécois, il y a bien eu des adaptations de romans commanditées par le clergé, et, à partir de 1935, le Petit Journal publie des séries humoristiques (L’Oncle Pacifique, Casimir) alors que La Patrie publie Bouboule.
Il est donc intéressant de trouver ces quelques narrations graphiques dans le carnet de la famille Bilodeau. Ces dernières sont signées par Ulois de Labiou (Louis Bilodeau) alors âgé de 15 ans et étudiant au Collège Saint-Alexandre de Limbour (aujourd’hui un quartier situé au centre de Gatineau).
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Un autre texte est particulièrement intéressant et dans un style tout aussi rare pour l’époque. Le même Louis Bilodeau reprend l’histoire du Petit Chaperon rouge mais la situe en l’an 2000. Très peu de romans de science fiction sont publiés au Québec à l’époque. Ce style ne connaîtra vraiment son essor qu’au cours des années 1960. Il est fascinant de voir comment un adolescent de 1934 imaginait l’époque dans laquelle nous vivons présentement.
Louis Bilodeau fera carrière comme traducteur à l’emploi du gouvernement fédéral. Toujours intéressé par la littérature, il fera partie de plusieurs associations littéraires et publiera de nombreuses lettres ouvertes dans les journaux. Puis, en 1963, il réalisera un de ses rêves d’adolescence en publiant son roman Belle et grave aux Éditions Beauchemin. M. Bilodeau est décédé le 29 décembre 1991 à Sillery.

Nos remerciements aux professeurs Michel Viau et Sylvain Lemay de l’École multidisciplinaire de l’image, programmes en bande dessinée, de l’Université du Québec en Outaouais.
Jacinthe Duval, archiviste-coordonnatrice – BAnQ Gatineau
Ça m’amuse de voir le cahier qu’ils ont utilisé… Les gens faisaient de la récupération dans ce temps-là car ils ne dépensaient pas inutilement. Une bonne habitude à reprendre, ne serait-ce que pour des raisons écologiques. MH
Félicitations! Merci de partager ce petit trésor avec nous tous!
Merci beaucoup Jacynthe Duval et la BAnQ de diffuser cette œuvre de jeunesse de notre père Louis Bilodeau, dont c’est par ailleurs l’anniversaire de naissance aujourd’hui. Il y avait aussi une grande activité épistolaire dans cette créative famille de six enfants. Mon père a écrit beaucoup de poèmes et a toujours regretté de ne pas pouvoir se consacrer davantage à la littérature. Mais il a rencontré la femme de sa vie et ensemble ils ont décidé de faire fonder une famille de 12 enfants, ce qui était incompatible avec la carrière littéraire.
Pour information, sur la photographie du lancement de Belle et grave, on reconnaît, derrière Louis, l’artiste peintre Louise Latrémouille à qui mon père avait offert d’exposer ses œuvres à l’occasion du lancement de son roman.