Censure lors de la Semaine du film français
La Semaine du film français se tient à Montréal du 3 au 9 novembre 1958 en présence de plusieurs vedettes dont Arletty, Jean-Pierre Aumont, Daniel Gélin, René Clair, Charles Vanel, Dany Robin, François Périer et Mijanou Bardot.
Le long-métrage « Maxime » du réalisateur Henri Verneuil doit inaugurer cet événement organisé par Unifrance Films, association chargée de la promotion et de l’exportation du cinéma français dans le monde. À la suite des coups de ciseaux du Bureau de censure des vues animées de la province de Québec, qui ampute la pellicule de 40 minutes, le distributeur refuse de présenter l’œuvre cinématographique prévue en première mondiale.

Le film d’ouverture est remplacé par « Les amants de Montparnasse » de Jacques Becker mettant en vedette les acteurs Gérard Philipe et Anouk Aimée, que l’on a allégé de quelques scènes ne totalisant qu’une minute. Basé sur l’histoire tragique de Jeanne Hébuterne et d’Amedeo Modigliani, le titre original est toutefois rebaptisé « Montparnasse 19 », le mot « amants » étant tabou à l’époque.
Le Bureau de la censure y insère également un « prologue » dans lequel les censeurs inventent de toutes pièces le mariage du peintre et de sa maîtresse. Les censeurs indiquent d’ailleurs de manière erronée, que le peintre Modigliani, nom orthographié « Mogliani » deux fois plutôt qu’une, est mort en 1919 alors qu’il est décédé en 1920.

Le fonds de la Régie du cinéma (E188), conservé à BAnQ Vieux-Montréal, compte quelques milliers de fiches de censure qui témoignent d’une époque au cours de laquelle les pellicules étaient régulièrement tronçonnées afin de correspondre aux valeurs morales de la société. La Régie du cinéma, abolie en 2015, cesse d’appliquer la censure dans les films en 1967.
Marthe Léger, archiviste – BAnQ Vieux-Montréal
En complément :
- Fonds Roland Laroche et Hélène M. Stevens (P944) (Dossier P944,S32,SS1,D5), dossier Semaine du film français
- Dictionnaire de la censure au Québec : littérature et cinéma / sous la direction de Pierre Hébert, Yves Lever et Kenneth Landry, Fides, 2006, p. 471-473
Très bon texte qui nous montre un aperçu de la censure au Québec.